Le Gouvernement a clairement exprimé sa volonté de recentrer la politique publique de formation professionnelle sur les citoyens les plus fragilisés vis-à-vis de l’emploi : les jeunes peu ou pas qualifiés, les demandeurs d’emploi et les salariés les plus exposés par les mutations économiques. L’urgence de la situation en France justifie amplement cette orientation, l’inscription de cette priorité dans la future loi sur la formation professionnelle, et sa mise en œuvre concrète.
Simplifier le système
Certes le système de formation professionnelle est complexe. On peut déplorer sa lourdeur, son coût, son manque d’efficacité, etc. Mais la complexité vient du fait que les acteurs du secteur ne soient pas les seuls à en subir les conséquences. Cela pèse surtout sur les utilisateurs du système, en particulier sur les publics les moins bien armés pour faire progresser leur employabilité. La priorité consiste aujourd’hui à simplifier l’accès à la formation et à rendre lisibles par tous les bénéficiaires aussi bien les droits, que les offres et les possibilités de parcours.
Favoriser l’équité, non l’égalité
Il est techniquement tout à fait possible d’améliorer le système existant notamment en écartant le principe d’égalité du système de formation actuel. Poussé à l’extrême, il ne produit pas l’équité attendue. En effet, ce principe bénéficie en premier lieu aux salariés les plus qualifiés : en 2010, toutes tailles d’entreprises confondues, 56% des cadres ont eu accès à des cours ou à des stages, contre seulement 39% des employés et 35% des ouvriers*. Les collaborateurs des entreprises de plus 1 000 salariés ont été statistiquement favorisés : ils sont 59% à avoir bénéficié d’une formation, contre 24% dans les entreprises de 10 à 19 salariés. Dans nombre de petites structures, les droits à la formation ne sont pas utilisés tout simplement parce que personne n’a le temps de s’en préoccuper. Enfin, il est démontré que les jeunes sortis du système scolaire sans qualification n’ont pas accès à la formation professionnelle et, comme l’a rappelé le Président de la République**, 13% de l’effort financier global est dédié aux demandeurs d’emploi.
Segmenter par souci d’efficacité
Pour recentrer la politique de formation sur ceux qui en ont le plus besoin, il faut sortir de la logique des pourcentages et des grandes masses – les jeunes, les chômeurs, les salariés les plus exposés… – et accepter de passer à une logique de segmentation. Le mot, par sa connotation inégalitaire et sa coloration « marketing », peut choquer mais il faut le prendre pour ce qu’il est : une technique éprouvée pour sortir des réponses indifférenciées et s’assurer que les 32 milliards d’euros mobilisés servent à accompagner les personnes qui en ont le plus besoin vers des qualifications porteuses et adaptées au tissu économique local.
Réaliser cet effort de segmentation préalable exige une base de technicité. Investir le temps de cette réalisation, c’est se donner les moyens d’améliorer la lisibilité de l’offre de formation pour les personnes les moins armées en les extrayant de la complexité inhérente à l’écosystème actuel. Ce point est fondamental pour généraliser l’accès individuel à des parcours de formation pertinents tout au long de la vie professionnelle. C’est la condition indispensable pour qu’un outil tel que le compte personnel de formation – dont les modalités restent à définir – ne reconduise pas les travers du système existant.
Pour en savoir plus, n’hésitez pas à me contacter.
* Source : Céreq, enquête CVTS-4 de 2010
** Discours de François Hollande sur la formation professionnelle, à Blois (Loir-et-Cher), le 4 mars 2013.